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Une garde-côtes européennes?

De V.G HAVELKA secrétaire rapporteur de l'ACOMM

Association des capitaines et officiers de la marine marchande.

 

 

 

Dans son livre "Préfet de la mer" Laurent MERER écrit page 88:

Le préfet maritime est devenu le "préfet de la mer". Ainsi notre pays dispose-t-il d'une institution bien adaptée pour traiter des affaires régaliennes à la mer.

Mais notre espace est aujourd'hui celui de l'Europe car la mer ne connaît pas de frontières, les marées noires ne s'arrêtent pas aux bornes des états, les traffics illicites se jouent des limites.

En France le préfet de la mer garde les côtes; il les garde globalement contre l'ensemble des menaces, à la différence de la plupart de nos voisins européens chez qui les responsabilités sont fragmentées et réparties entre de nombreux organismes nationaux, régionaux ou privés.

Il appartient désormais aux instances européennes et aux hommes politiques européens de définir ce que nous voulons garder en commun, quelle "garde des côtes" nous voulons. Cette perspective inéluctable, et que tous les amis de la mer souhaitent prochaine, ne pose à la France aucune difficulté: notre organisation actuelle s'insérera très simplement dans un dispositif plus large, il suffit d'en définir le cadre.

 

 

 

Réflexion sur la sécurité maritime et la garde-côtes européenne par Michel BOUGEARD.

Capitaine au Long cours. Officier du Mérite Maritime.

Article paru dans la presse le 13 novembre 2006

 

ROKIA DELMAS.

L'Union Européenne a-t-elle les moyens de sa politique de Sécurité Maritime ?

L'heure n'est pas à la polémique pour savoir où était exactement le remorqueur de sauvetage " ABEILLE LANGUEDOC " le 24 Octobre au petit matin quand le vent soufflait en tempête. Cette nouvelle fortune de mer s'étant déroulée si rapidement , le St Bernard de la mer dédié à la surveillance du Golfe de Gascogne n'aurait jamais pu intervenir à temps pour éviter que le cargo roulier ROKIA DELMAS, en panne de machine, ne soit drossé à la côte. Fort heureusement ses soutes de fuel lourd ne furent pas crevées quand il s'empala sur les roches au Sud de l'île de Ré.

Une seule ancre ne fut mouillée et encore elle ne toucha le fond semble-t-il qu'une fois le cargo échoué…Fausse manoeuvre qui pose une fois de plus, le problème récurrent de la qualification des équipages sous pavillons de complaisance et du nombre insuffisant des effectifs embarqués. Ce constat découle d'un manque d'intérêt des jeunes pour ce métier qui souffre actuellement d'une pénurie importante d'officiers et marins au niveau mondial. Comment faire pour armer les navires de plus en plus nombreux avec des équipages expérimentés ? Les effectifs sont squelettiques pas très qualifiés et trop souvent fatigués ! De ce fait prés de la moitié des navires qui sillonnent les mers pratiquent le quart de nuit en passerelle avec un seul officier sans matelot de veille, ce qui est strictement interdit par les règlements internationaux ! Les collisions, échouements en avant toute occasionnés par des " bateaux ivres " deviennent légion. Deux en moins de 5 ans se sont produits en Mer d'Iroise ( Moléne et Douarnenez ), sans que soit mise en cause l'organisation du travail décidée par l'armateur du navire et avalisée par l'Etat du pavillon. Pas de pollution à signaler donc pas de prise en compte par l'Etat côtier de l'étendue de la menace.

La récente mise en service d'un super porte conteneurs de 13.000 " boites ", pouvant être armé par 13 hommes seulement, donne froid dans le dos : un monstre de 400m de long, lancé à 25 nœuds avec 13.000 tonnes de fuel lourd dans ses soutes ! L'Europe prend conscience de la gravité des problèmes posés par le transport maritime, les catastrophes de l'ERIKA et du PRESTIGE y sont pour beaucoup. Mais l'UE se donne-t-elle les moyens financiers nécessaires pour mener et crédibiliser une politique intégrée de Sécurité Maritime ? On peut en douter. Le budget de l'Agence Européenne de Sécurité Maritime (EMSA) n'était en 2005 que de 35 millions d'Euros . Le résultat est qu'elle ne disposait que de 18 millions pour prendre des mesures anti-pollution en affrêtant des navires dépollueurs aux endroits stratégiques. Pour ce faire le câblier ILE DE BREHAT fut transformé en navire anti-pollution mais le hic est que ce navire est dédié principalement à la réparation des câbles sous marins dans une zone d'intervention immense qui va de l'Islande au Brésil ! Le résultat est que l' ILE DE BREHAT était en opération câble le 24 Octobre quand le ROKIA DELMAS s'est échoué... sans polluer !

Ne serait-il pas du ressort de l'EMSA de financer aussi les frais d'affrètement des remorqueurs de sauvetage en station à Brest, Golfe de Gascogne, Cherbourg, Toulon et Pas-de-Calais ? La facture est lourde pour l'Etat Français, prés de 60.000 Euros par jour, alors que plus de 95% des navires qui transitent en Manche n'escalent pas dans un port de l'hexagone ! Il serait normal que l'Europe aide la France la plus exposée, figure de proue de l'Europe.

Trois milliards 500 millions de tonnes de marchandises sont chargées et déchargées dans les ports de l'Union. Rotterdam traite à lui tout seul 360 millions de tonnes soit l'ensemble des tonnages entrant et sortant dans les ports Français ! Pourquoi ne pas instaurer une taxe de UN Euro par tonne sur toutes les cargaisons manipulées pour alimenter un budget Sécurité Maritime ? En fin d'année la Commission Européenne rendra sa copie quant à la faisabilité d'une Garde Côtes Européenne, étude commandée par le Parlement Européen. Ce corps spécialisé que tous les marins appellent de leurs vœux verra peut-être le jour et ne doutons pas que si son budget initial est alimenté par la taxe au tonnage décrite plus haut, soit plus de 3 milliards d'Euros par an, l'European Coast Guard a toutes les chances de relever avec succès les défis aux quels elle sera confrontée.

Michel Bougeard

 

 

 

Capitaine courageux

Le 26 Décembre 1951 une rude tempête balaie l'Atlantique Nord. Pris dans la tourmente, le cargo américain Flying Enterprise lutte désespérément contre les éléments déchaînés au suroît de l'Irlande. Sous l'assaut de vagues gigantesques le navire est rapidement en perdition, des fissures et une voie d'eau se déclarent dans sa cale avant. Il prend rapidement une forte gîte.

Les 35 membres de équipage et quelques passagers sont rapidement évacués dans une mer démontée. Mais son capitaine Kurt Carlsen ne peut se résoudre à abandonner son navire tant qu'il flotte ! La gîte augmente de jour en jour . Le temps est exécrable, le fameux remorqueur anglais Turmoil ne peut passer sa remorque que le 5 Janvier. Le commandant Carlsen étant seul à bord pour aider à la manœuvre !

Le remorqueur de sauvetage français Abeille 25 est aussi sur les lieux et reste à proximité, paré à porter assistance en cas de besoin.

Au matin du 9 Janvier, l'amarre se rompt à 90 kilomètres de Falmouth. Le commandant Carlsen est toujours à bord du Flying Enterprise avec le second capitaine du Turmoil. Le navire est couché sur son côté bâbord et s'enfonce de plus en plus. Le 10 Janvier le vent souffle en ouragan, le capitaine Carlsen et le second du Turmoil rampent sur la cheminée presque à l'horizontale et sautent à l'eau à 15H00. Ils sont repêchés transis et fourbus par le remorqueur ! Le Flying Enterprise sombrera une heure plus tard à 16H11.

Son commandant sera accueilli en héros à Falmouth. Le dessin le représentant seul, agrippé à la coque de son navire fera le tour du monde… " Radar " l'hebdomadaire Français bien connu à l'époque en fait sa première page.

Autres temps, autres mœurs ! Cinquante cinq ans après cette épopée, presque jour pour jour, l'équipage du MSC Napoli et son commandant, ont abandonné le super porte conteneurs en détresse le jeudi 18 Janvier 2007. Les 26 marins ont quitté le navire avec les embarcations de sauvetage du bord, prenant de ce fait de gros risques, avant même que les hélicoptères arrivent ! Le navire sera pris en remorque le jour même par l'Abeille Bourbon et échoué volontairement sur une plage du Devon dans le sud de l'Angleterre, trois jours plus tard !

Faut-il en vouloir aux marins du MSC Napoli qui connaissaient peut-être le passé composé, cabossé de leur navire et sa possible fragilité de structure , d'avoir cédé à un moment de panique ? Bien sûr que non. Ils craignaient à juste titre qu'il se casse en deux très rapidement, les engloutissant corps et âmes . Notons qu'il se trouvait dans la même zone où , en Mars 1981, le pétrolier Malgache Tanio se brisa en deux, dans de semblables conditions de mer et après aussi de grosses réparations de sa coque.

Le transport maritime a changé. Sur les navires surtout. On ne peut critiquer ce réflexe précipité mais bien humain pour sauver sa peau. Ils sont tous sains et saufs . C'est le principal.

Mais force est constater qu'il n'y a plus ou si peu, cet esprit d'équipage et encore moins d'esprit compagnie qui par le passé, soudaient les marins à leur navire , à leur armateur. Les équipages multi-ethniques constitués de bric et de broc par des sociétés spécialisées de gérance des personnels, avec des effectifs insuffisants, instables , manquant trop souvent de qualification, causent de graves problèmes au niveau de la sécurité du transport maritime . La pénurie généralisée de marins au niveau mondial ne fait qu'aggraver la situation.

Les vrais armateurs sont désormais hélas une minorité et les Capitaines Carlsen plus rares. Peut-on aussi assurer que, transposé en 2007, Kurt Carlsen aurait eu cette même attitude héroïque ? Rien n'est moins sûr ! Les temps changent, les hommes aussi.

Quoiqu'il en soit, il faut que l'Europe prenne une fois pour toutes l'exacte mesure de cette menace et se donne les moyens pour la contrer, en hommes et matériels : Une taxe au tonnage des marchandises transportées transitant dans les ports de l'Union s'impose. Elle alimentera un budget conséquent et nécessaire pour l'Agence Européenne de Sécurité Maritime et son bras armé la future Garde-Côtes Européenne intégrée que tous les marins réclament pour mettre de l'ordre sur mer et dans les ports, de la Baltique à la Mer Noire. Autre sujet de préoccupation, réclamant toute notre vigilance : L' ancien super tanker de 300.000 tonnes Limburg, gravement endommagé lors d'un attentat Kamikaze au Yémen, a été réparé et navigue toujours. Il se pourrait que le Maritime Jewel , c'est son nouveau nom, vienne à circuler dans nos eaux communautaires un de ces jours, à pleine charge !

La fortune de mer du porte conteneurs met aussi en lumière le problème des zones de refuge ! Les Britanniques ont accepté la venue du convoi dans leurs eaux pour l'échouer sur la plage de Brandscombe dans une baie classée au patrimoine de l'humanité ! Décision courageuse des autorités qu'on ne peut que louer : Bravo. Il est vrai que ce navire battait pavillon britannique et que cette baie refuge du Sud de l'Angleterre est bien abritée des vents du Nord soufflant actuellement !

Essayons d'imaginer ce qui se serait passé si le MSC Napoli avait connu ses ennuis au milieu du Golfe de Gascogne par une forte tempête de suroît : L'Abeille Languedoc (en station dans le Golfe) l'aurait pris en remorque pour le ramener soit en rade de Brest pour mise directe au bassin de radoub, tirant d'eau permettant, ou alors le tracter en baie de Douarnenez pour l'échouer volontairement sur la Lieue de Grève ! Comment aurait alors réagi les populations côtières ?..

Michel Bougeard . Capitaine au Long Cours

 

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